Quelle dose de thrombolyse pour dissoudre le caillot ? La situation du
médecin face à un accident vasculaire cérébral est comparable à une
partie de poker : décider dans l’urgence sans avoir toutes les cartes en
main.
« Il y a plus de recherches pour comprendre comment les gens jouent
ou achètent plutôt que pour découvrir comment les médecins prennent des
décisions complexes », regrette le Dr Gustavo Saposnik, neurologue et
chercheur à l’Université de Toronto. Selon un article qu’il publie avec
ses collègues dans la revue américaine Stroke, les médecins qui ont à
prendre en charge des accidents vasculaires cérébraux seraient pourtant
bien avisés de s’inspirer des méthodes des joueurs de poker ou des
spécialistes du marketing.
S'appuyer sur les statisques plutôt que sur son intuition
En cas d’AVC, il faut recourir en urgence à la thrombolyse, un
traitement injecté pour dissoudre le caillot empêchant l’irrigation
correcte du cerveau. La dose de médicament à injecter doit être décidée
très vite, sans avoir forcément toutes les informations nécessaires et
en cas de surdosage, le risque hémorragique est très important. Les
chercheurs ont donc fait le parallèle avec la situation du joueur de
poker qui doit décider de suivre, de relancer ou de faire tapis sans
connaître les mains de ses adversaires.
« Les joueurs s’appuient généralement sur les statistiques pour
décider si les cartes qu’ils ont en main leur offrent une chance
raisonnable de gagner. Alors que les médecins s’en remettent plutôt à
leur intuition, qui ne les exempte pas de biais et de jugements
hâtifs », souligne le Dr Saposnik. Poursuivant le parallèle avec les
stratégies marketing, les chercheurs soulignent le risque pour les
médecins d’être tentés de réagir immédiatement à la première information
disponible, comme un utilisateur de téléphone portable appâté par un
forfait en forte promotion les premiers mois même si le prix les mois
suivants sera finalement très élevé.
Le choix du patient doit primer
Les médecins devraient donc être encouragés à utiliser davantage les outils d’évaluation tels que les scores de risques pour les aider à prendre des décisions rapides, appropriées et non biaisées face à des scénarios cliniques compliqués comme la prise en charge de l’AVC. D’autant qu’avec le vieillissement de la population, le risque d’accident vasculaire cérébral va aller croissant et que les victimes seront des cas de plus en plus complexes, souffrant de plusieurs autres pathologies et présentant d’autres facteurs de risque. Mais les auteurs soulignent aussi qu’à la différence du poker ou du marketing, il y a pour les médecins un facteur-clé susceptible de contredire les scores de risque : le choix du patient ou de sa famille.
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